Les Estienne — Chapitre I, deuxième partie

Gutenberg s’établit à Strasbourg. Il associe à ses travaux trois bourgeois de la ville qui fournissent les fonds nécessaires… L’œuvre marche… Toutefois une difficulté arrête l’inventeur. « Il reste à trouver un métal, ou à obtenir un alliage convenable pour la multiplication des lettres… Le fer était trop dur : il perçait le papier ; le plomb était trop mou : il s’écrasait sous l’effort de la presse… Il fallait, au moyen de l’alliage de certains métaux, arriver à des caractères possédant un degré de dureté convenable et susceptibles d’être coulés dans les moules.
« … pour arriver à créer l’œuvre glorieuse qu’ils avaient entreprise, les associés de Gutenberg n’hésitèrent pas à vendre leurs meubles, leurs bijoux, et même leur patrimoine. Aucune plainte ne sortit jamais de leur bouche tant ils avaient conscience de la grandeur de l’œuvre et du géni de l’ouvrier qui la dirigeait.
» Tout ce qui touche à l’histoire de la découverte de l’imprimerie est d’un si puissant intérêt, que nous inscrivons ici les noms des trois hommes qui aidèrent Gutenberg de leur fortune et de leur intelligence pour enfanter ce grand art : C’étaient Heilmann, André Dryzehn et Riff.
» Découragé par la mort de ses associés arrivée sur ces entrefaites et poursuivi par ses créancier, Gutenberg abandonna ses travaux et quitta Strasbourg (2). »
Il revint à Mayence, s’y associa avec un riche banquier nommé Faust, et un jeune clerc très instruit et habile copiste du nom de Shœffer, qui lui aida, paraît-il à obtenir l’alliage qu’il avait jusque là vainement cherché.
Cette imprimerie de Mayence atteignit rapidement un haut degré de perfection : Gutenberg n’en profita pas. Odieusement exploité par ses associés, le père de l’imprimerie, réduit à la misère, dut s’expatrier de nouveau.
Il essaya une seconde fois de s’établir à Strasbourg, et y fonda en effet une imprimerie, mais qui réussit peu, puisque nous le voyons, vers la fin de ses jours, trouver un asile auprès de l’archevêque de Mayence, qui le met au nombre de ses gentilshommes, et lui fait une pension ; générosité grâce à laquelle l’illustre inventeur peut consacrer les dernières années de sa vie à perfectionner sa découverte.
Après sa mort (février 1468) ses enfants (3) se dispersèrent sur divers points de l’Europe : Cologne, Augsbourg, Nuremberg, Bâle virent fleurir l’industrie nouvelle.
Paris ne pouvait et ne devait pas demeurer en arrière de ce grand mouvement. Le nom propre qui le personnifie le mieux est celui des Estienne dont nous allons esquisser à grands traits la biographie.
Constatons auparavant que loin de rencontrer des obstacles dans l’autorité royale, l’imprimerie trouva, au contraire, auprès de nos rois, sympathie et appui.
« Louis XI accorda des lettres de naturalisation aux typographes allemands ; Charles VIII admit l’imprimerie et la librairie à participer aux privilèges et prérogatives de l’Université. Louis XII, confirmant ces privilèges et prérogatives, considéra cette invention « comme plus divine qu’humaine » ; François Ier exempta les libraires-imprimeurs de tout service militaire. Louis XIII, ou mieux le Cardinal Richelieu, fonda l’imprimerie royale et l’installa au Louvre (4).
(A suivre)
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(2) — M. Louis Figuier : Les grandes inventions
(3) —  Les ouvriers imprimeurs ont porté longtemps le nom « d’Enfants de Gutenberg. »  
(4) — Transféré plus tard à l’hôtel de Rohan, rue Vieille-du-Temple, cet établissement, aujourd’hui Imprimerie nationale, est le plus riche du monde par la variété et la perfection des caractères. « Elle est organisée pour occuper des milliers d’ouvriers ; cependant elle n’emploie ordinairement que 40 fondeurs, 200 compositeurs, 250 imprimeurs, 20 relieurs et 130 régleuses, brocheuses, etc. »

Les célébrités de l'atelier - Ouvriers et inventeurs (1887)

Chapitre I, première partie

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