On a eu tort de railler l’inefficacité des révolutionnaires de salon, car il ne s’est déroulé aucune révolution dont le sort ne fût scellé dans les cénacles intellectuels, pour le malheur de ceux qui les avaient entreprises de leur sang. Du moins, le lit a sur les salons, les cafés, les sectes, les réunions de famille, l’avantage d’inciter médiocrement à pérorer, régenter, récupérer, travailler à la gloire des batailles et mener la guerre à coups de proclamations. Il incline à rêver, à paresser, à caresser, à jouir au point de devenir sourd aux ordres, insensible à la peur, avide d’infinies voluptés. Et quel privilège ! Ceux qui sortent du lit pour prendre les armes savent enfin pourquoi ils veulent se battre. |
On peut également, de son lit, consulter le blog de Bertrand.
Sans doute un auteur ayant fait l'éloge de la paresse, genre Samuel Johnson, Kazimir Malevitch, Bertrand Russel ou Jerome K. Jerome.
RépondreSupprimerMais le texte semble d'origine française (notamment en raison de la proximité phonétique entre "paresser" et "caresser") et semble dater de la Belle Époque au plus tard.
Jules Renard ou Félix Fénéon, peut-être ?
Bonjour Georges,
RépondreSupprimerAh non ! Quoique vos remarques soient des plus judicieuses.
Oui, cet auteur a fait (aussi) l'éloge de la paresse, Georges. Mais ce n'est pas Lafargue non plus...
Z'cusez-moi, George, pur ce "s" inopportun à votre prénom.
RépondreSupprimerJe penche pour deux noms proches de votre univers poétique et littéraire, Bertrand, mais j'hésite :
RépondreSupprimerFallet ou Hardellet ?
Non plus, cher Tenancier. Mais je vous donne une indication : vous êtes dans l'époque. Assez loin, mais dans l'époque quand même.
RépondreSupprimerCool, Raoul !
RépondreSupprimerPour ma part (de passage sur votre blog), je dirais, à cause du thème et d'un je-ne-sais-quoi dans le rythme de la phrase, que c'est de Raoul Vaneigem.
RépondreSupprimerAlors, Bertrand, est-ce qu'on va savoir "qui c'est, Raoul" ?
RépondreSupprimerSi c'est cela, George n'est pas très loin non plus, le style de Vanegheim étant assez Fin-de-Siècle, par certains aspects.
C'est vrai que la phrase finale sonne beaucoup comme les fameuses formules de Vaneigem qui parsèment le Traité, auquel cas je me suis complètement fourvoyé (mais pas comme Jean-Pierre, heureusement…) dans mon premier commentaire.
RépondreSupprimerSi on était demeuré à la Belle Époque, j'aurais dit Raoul Ponchon, mais je crois qu'il n'a publié que des recueils de poèmes…
Alors toutes mes félicitations à Grégory, une fois de plus !
Ah, mais je comprends pourquoi je n'ai pas reconnu d'emblée !
RépondreSupprimerJ'ai lu le Traité de savoir-vivre… voici plus de vingt ans mais je m'en souviens tout de même encore pas mal.
Tandis que cet extrait-ci provient du Livre des plaisirs (Encre, 1979, p.49 — aucun mérite de ma part, c'est Gougueule qui a trouvé), qui m'est assez vite tombé des mains tant je le trouvais inférieur au Traité.
Alors merci Bertrand : voilà qui donne envie de se replonger dedans !
Et mes excuses à Bob de passage : lui aussi a droit à nos félicitations, car il est vrai que malgré des défauts d'ordre extra-littéraire (surtout enthousiasme démesuré et volontarisme, à mon sens), Vaneigem a un style indubitable que l'on aurait du reconnaître.
RépondreSupprimer(et moi j'aurais dû écrire "dû…)
RépondreSupprimerJe précise que lorsque je disais reconnaître Vaneigem, le temps que je laisse mon message, celui de Grégory n'était pas affiché et que je l'ai découvert après l'avoir posté. Félicitations donc à Grégory !
RépondreSupprimerFélicitations à tout le monde, na voilà.
RépondreSupprimerOui, Bravo ! Il s'agit bien de Raoul Vaneigem, Le livre des plaisirs, Ed. Encre, 1979, page 49, come le précise George.
RépondreSupprimerGrégory a du mérite... Et, hum, hum, je crois savoir qu'il sait que je suis un "nostalgique" de Vaneigem.... "Un vieux de la vieille anarchie"... Ceci dit sans rancune ni dépit, mais avec le sourire.
Tenez, j'en remets une couche à la Vaneigem, de mémoire :
" Refuser un monde où la certitude de ne pas mourir de faim s'échange contre celle de mourir d'ennui"
C'est pas beau, ça, les gars ?
Amicalement à tous.
A défaut d'avoir su le nom de l'auteur de ces lignes, je ne peux qu'en saluer la pertinence (et les connaissances de ceux qui ont reconnu l'impétrant...).
RépondreSupprimerEt il ne m'étonne que ce soit ce cher Bertrand qui ait proposé ce texte !
Otto Naumme
Petite rectification, cher Bertrand : la citation exacte est « Nous ne voulons pas d'un monde où la garantie de ne pas mourir de faim s'échange contre le risque de mourir d'ennui ».
RépondreSupprimerMais à la réflexion, je me demande si votre reformulation n'est pas supérieure…
Il y a aussi celle-ci, entre autres, anti-léniniste en diable :
« Ceux qui parlent de révolution et de lutte de classes sans se référer explicitement à la vie quotidienne, sans comprendre ce qu'il y a de subversif dans l'amour et de positif dans le refus des contraintes, ceux-là ont dans la bouche un cadavre. »
D'ailleurs, il était déjà complètement faux en 1967 d'affirmer que nul ne meurt de faim dans ce monde (tiens, ça me rappelle que je n'ai pas encore déjeuné…)
RépondreSupprimerJe propose donc la reformulation suivante :
Nous ne voulons pas d'un monde où la probabilité de ne pas mourir de faim s'échange contre celle de mourir d'ennui.
Qu'en pensez-vous ?
Élaguez donc cher George, pour un :
RépondreSupprimerNous ne voulons pas d'un monde où ne pas mourir de faim s'échange contre mourir d'ennui. Préciser les notions de risque et de probabilité n'ont guère d'intérêt désormais, me semble-t-il.
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ArD
La discussion byzantine autour d'une formulation plus adéquate que la citation initiale « Nous ne voulons pas d'un monde où la garantie de ne pas mourir de faim s'échange contre le risque de mourir d'ennui » oublie qu'en 1967 un tel projet relevait certes de la propagande spectaculaire mais que c’était déjà une réalité vécue dans la société dans laquelle vivait Vaneigem puisque personne ne pouvait dire qu’en Europe à cette époque (et depuis) on puisse mourir de faim – en revanche, mourir d'ennui est devenu depuis le programme général.
RépondreSupprimerQue mourir d'ennui soit devenu le programme général, j'en conviens tout à fait, Bob, mais vous avez raison de préciser auparavant, à propos de la satiété, "en Europe", car hélas la famine n'avait pas disparu du reste du monde, dans les années 60 et 70 : voyez, le Biafra, le Sahel, que sais-je…
RépondreSupprimerMais bon, sur le fond nous sommes bien d'accord.
(Et je précise qu'hélas je n'écris pas ceci depuis le fond de mon lit…)
Merci, George, pour la reformulation exacte. J'avais cité de mémoire.
RépondreSupprimerJe suis assez d'accord ( oh, quel vilain euphémisme !) avec la citation remaniée d'ArD, car la probabilité et le risque, s'agissant de mourir, certes, n'a plus guère de sel aujourd'hui, si tant est qu'elle en ait eu un jour un.
En revanche, je pense que le "mourir de faim" de Vaneigem n'était pas à prendre, Bob et George, dans sa conception stricto sensu. Elle était - et reste - une allégorie pour dire que le travail aliéné, salarié, celui qui vous procure le pain, celui pour qui les hommes n'on pas cessé de réclamer d'y avoir tous accès dans un discours politique de tous bords; discours de plus en plus misérable, veule, bas, racoleur,sale,(je pourrais épuiser le dictionnaire des synonymes sur le sujet) ce travail, donc, s'il procurepeu ou prou la survie, assure surtout un mortel ennui.
1967 fait partie des Trente glorieuses où l'on n'était quasiment chômeur que par conviction.
Regardez (mais vous le savez aussi bien que moi) à quoi se résume le bonheur : avoir un frigo à peu près joyeux, un toit qui ne laisse pas passer la pluie. Bref, avoir ce qui, le pus sûrement du monde, tue le désir de vivre, un boulot salarié.
Je sais bien que d'aucuns diront : il en parle à son aise, il travaille plus.
Ce à quoi je rétorquerai, avec le sourire un peu méchant : je n'ai quasiment jamais travaillé. Ou si peu !
Feignant, va !
Amicalement à tous
Bon, c'est comme si on était au cinoche avec un film emmerdant mais avec un baril de pop-corn ?
RépondreSupprimerJ'ai bon, là ?
Excellent, même.
RépondreSupprimerLe couillon, pour oublier le film, se gave de pop-corn, l'honnête homme, lui, essaie de caresser les genoux de sa voisine...
J'ai bon aussi, là ?
Bien à Vous, Tenancier !
Pardonnez-moi, mais c'est justement ça : j'avais envie de jouer au couillon. Car tout de même, amis visiteurs, lecteurs et commentateurs, vous êtes bien tous graves, à faire de l'exégèse sur la citation exact !
RépondreSupprimerD'ailleurs, j'ai une réserve de virgules récupérées sur un vieux fonds de je ne sais où.
Je les tiens à votre disposition, ça peut servir.
Eh bien, cher Tenancier, seriez-vous ronchon, en cette fin d'après-midi (celle où vous avez écrit ces lignes) ?
RépondreSupprimerPour vos virgules, je pourrais bien être preneur, j'ai quelqu'ouvrage en cours qui en bénéficierait grandement...
Otto Naumme
Oh, mais,à propos des "avantages du lit" , ça roupille un peu là, hein, sur Feuilles d'automne...
RépondreSupprimerBon. Tiens, à propos de feuilles d'automne ...
FICTION : C'est un gars gardien d'un parc et qui fait sa tournée du soir avant de fermer les grilles, voir s'il n'y a plus personne dans les allées.
Et il trouve un autre gars planté devant une magnifique statue de femme, nue, avec la feuille de vigne si prude et si mal placée.
- Monsieur, je vais fermer, qu'il dit le gardien..
- A votre aise, répond l'autre imbécile. Mais moi, je reste ici. J'attends l'automne.