Roland C. Wagner (1960 — 2012)

Roland est mort hier.
Ici on ne trouvera pas d’hommage ni quoi que ce soit. La chose serait délicate car il ne fut jamais un proche et pourtant lui et moi nous connaissions depuis des années. Parler de quelqu’un que l’on connaît c’est un peu parler de soi. Nous nous étions rencontrés en 1982 en compagnie d’un autre protagoniste fort présent sur ce blog pour réaliser une émission sur la science-fiction sur Radio Libertaire. De nous trois, c’était bien lui qui avait le plus qualité pour en parler : fan de SF depuis toujours, il emmerdait les auteurs qui se rassemblaient dans les conventions. Pourtant, progressivement, Roland s’était débarrassé de cette image pour évoluer – non sans chaos dans sa vie personnelle – vers le métier d’écrivain. Ce ne fut pas sans peine non plus. Je me souviens du feuilleton radiophonique tiré d’un de ses manuscrits, Les Derniers Jours de Mai qu’il lisait à l’antenne et ses multiples remaniements qui aboutirent enfin en une parution en roman. Nous sommes encore quelques uns à sourire à la rémanence de certains gimmicks dans ce feuilleton, comme : « Killer le mutant meurtrier aux pouvoirs incommensurables ». Pendant les nombreuses années où j’ai animé cette émission, l’ombre de Roland se profilait fréquemment, soit pour accompagner quelques auteurs qu’il admirait considérablement, comme Norman Spinrad, soit pour venir causer de ses dernières parutions, lesquelles se bonifiaient et se paraient d’humour, chose improbable à mes yeux lorsque je l’avais connu dans les premiers temps. Sans doute était-ce aussi par le fait de commencer à voir au-delà de sa banlieue, car Roland était presque l’inventeur d’un genre à lui tout seul : la banlieue-fiction. Son exil en province par la suite était en somme un bon choix. Et puis, c’est un peu grâce à lui que je pus faire mes débuts littéraires en compagnie d’un auteur comme Christian Oster. Il est vrai que c’était dans son fanzine et qu’il vaut mieux – pour mon cas – de ne pas y aller voir de trop près. J’ai été son éditeur. De cela je n’en dirai pas plus. Le succès de son texte suffit à parler pour lui. C’est peut être cela qui m’a empêché de me rapprocher de lui. Peut être est-ce aussi que nos vues, nos conceptions de la littérature et des relations avec autrui différaient de façon trop importante. Que dire de plus ? Le reste appartient aux thuriféraires. Tout ce que je sais, c’est qu’il a pu voir paraître un roman — Rêve de Gloire — qui lui tenait à cœur et dont il m’avait parlé il y a déjà plus de vingt ans. C’est déjà pas mal et le message pour nous est évident : dépêchons-nous.
Pour le reste, le manque de savoir-vivre de Roland s’est confirmé sur le bord de la RN10, hier à 13 h 45.
Je continue donc de le désapprouver au plus fort de moi-même.

3 commentaires:

  1. Malgré ce que vous affirmez d'entrée, Tenancier, c'est un bel hommage en creux, discret et pudique.
    Saloperie ! (vous m'excuserez de ne pas me répandre en calembours, cette fois).

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  2. Ce cher George a raison, c'est bien, cher Tenancier.
    Je n'en dirai pas plus, si ce n'est que j'étais le troisième de l'équipée radiophonique et que je suis triste.

    Otto Naumme

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