Les Guides Bædeker

Encore un billet qui saura de nouveau, on l’espère, séduire Phil !...

Bædeker (Charles et Fritz), éditeurs allemands, né le premier en 1837, le second en 1844, sont les fils et les successeurs de Charles Bædeker (né le 3 novembre 1801, mort le 4 octobre 1859), le fondateur d’une collection allemande de Guides de voyages (Reisehandbücher), aussi connue en Europe que la collection française de Joanne, ou la collection anglaise de Murray. Avec leur frère aîné Ernest (né le 26 octobre 1833, mort le 23 juillet 1861), ils dirigèrent la maison de Coblentz, qu’ils ont depuis transportée à Leipzig. Ils ont ajouté aux volumes publiés par leur père les guides sur Londres et l’Angleterre (Coblentz, 1862), sur l’Italie, (3 parties : Haute-Italie Ibid. 1861 ; Italie Centrale et Rome. Ibid. 1866 ; Basse-Italie, Sicile, etc., Ibid 1866), sur la Palestine et la Syrie (Leipzig, 1875), formant la première partie de l’itinéraire de l’Orient. La plupart de ces guides, souvent réimprimés, ont été traduits en français par les soins de leurs éditeurs eux-mêmes.

G. Vapereau : Dictionnaire universel des contemporains – 1880


Il y a peu à renchérir sur l’article ci-dessus et sur le sujet des guides Bædeker sinon que ceux-ci font l’objet de la convoitise de nombreux collectionneurs. C’est en effet tout un panorama des mœurs, des sociétés du XIXe siècle tout autant que la géographie et les indications touristiques qui se trouvent dans ces pages. L’essor des guides de voyages à cette période accompagne celui des sociétés de géographie, la longue théorie des écrits de voyage et même l’entreprise d’un Albert Kahn pour un inventaire iconographique du monde vers la fin de ce siècle. On citera encore – dans cet esprit d’inventaire – les écrits de Verne, très inspirés par les voyages d’Arago (songeons aux Voyages extraordinaires, dont le bréviaire est constitué à la fois des notes tirées d’Arago et d’autres ouvrages de géographie, de guides de voyage et d’indicateurs de chemins de fer !)
De l’apanage d’une certaine élite scientifique et artistique, le voyage lointain va devenir un des attraits de la vie bourgeoise du XIXe siècle. Des guides tels que les Bædeker vont peu à peu reculer les limites de l’exploration « confortable », si l’on peut dire. Ces guides sont parfois utilisés par quelques écrivains historiques contemporains qui puisent en eux des éléments solides pour leurs reconstitutions.
Tout amateur du XIXe siècle se doit d’avoir au moins parcouru un Joanne ou un Bædeker !

20 commentaires:

  1. ha ! merci Tenancier !
    ...vous savez que je passe souvent vous voir, dans un incognito internet fort transparent, mais n'ose notuler quand je m'instruis, (sauf chez passouline, où l'on saute si souvent la note de départ).
    Aujourd'hui, la vue d'une couverture en percaline incite à braver le flux d'instruction.
    Les premiers Baedeker, publiés autour de 1840, devaient aussi combler les amateurs du XVIIe siècle. Le Baedekerien recherche les annotations pittoresques: "ces bains sont un endroit répugnant, promiscuité intolérable", Baedeker Budapest, 1856, bains Gellert. Aujourd'hui, spa cinq étoiles couru par la schickeria euro-austro-saxonne.
    Baedeker (père) comme Joanne, sont morts jeunes. Huret, Tissot et Béraud sont les derniers littérateurs inspirés de l'esprit baedeker, voyageur de nouveau régime visitant à la manière de l'Ancien.

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  2. Juste au moment de partir, je trouve votre mot. J'ai un témoignage oral selon lequel, dans les années 70, les bains de Budapest étaient tout aussi répugnants. Les grands guides ont de ces permanences...
    Heureux de vous retrouver ici.

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  3. me revoilà ! vous l'ai bien dit: impossible de résister à la vue de cette couverture en percaline, il m'a donc fallu plonger dans l'agrandissement de la photographie de votre article.
    Comment appelez-vous cette police d'écriture qui fait pendouiller le "G" et le "B" en lettres dorées du titre "Great Britain" ? car les Baedeker se reconnaissent aussi au titre: "Paris" écrit en lettres pendouilleuses ("P" et "s" pointus) a plus de valeur que les suivants aux lettre égalisées.
    Aussi: comment se nomment les nervures qui rappellent un fermoir d'ouvrage précieux, imprimées en profondeur en bas et haut de la couverture ?
    Comme vous le savez, la passion a besoin du mot juste pour se cultiver. Livrez-moi le mot exact, tenancier !
    Les bains de Budapest (la plupart) ont été assainis à partir de la chute du mur.
    Mais Tissot adorait les bains vers ...1880. Peut-être à cause de de leur promiscuité, plus que pour leur propreté.

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  4. Ah oui, je confirme, la piscine municipale thermale de Budapest dans la quelle on houe aux échecs, parfaitement propre en 1992.
    --
    La nervure : un filet gravé en creux ?

    ArD

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  5. « Comment il avait échoué à Alexandrie que, d'ailleurs, il était toujours sur le point de quitter ne pouvait guère intéresser un touriste. Max était de ces vagabonds qui n'existent, sans toutefois l'avoir souhaité, que dans le monde Baedeker : partie intégrante du paysage, au même titres que ces autres automates, les serveurs, les porteurs, les cochers, les employés. Inévitable. Chaque fois qu'il travaillait, resquillant un repas, une consommation, un logement, une sorte d'accord tacite prenait effet entre Max et sa "touche", qui acceptait de voir en Max un touriste aisé, mais provisoirement en difficulté par la faute de quelque défaillance de la machinerie Cook.
    Un jeu courant parmi les touristes. Ils savaient bien à qui ils avaient affaire ; et ceux qui participaient au jeu se conformaient à cette discipline qui vous oblige à marchander dans une boutique ou à donner le bakchich aux mendiants ; c'étaient là les lois non écrites du pays Baedeker. Max représentait en somme un de ces désagréments mineurs dans un état touriste, à la structure autrement presque parfaite. Le désagrément étant largement compensé, d'ailleurs, par la "couleur locale". »
    (Extrait de "V" de Thomas Pynchon - le bouquin contient d'autres mentions de Baedeker.)

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  6. 2007, bains Geller, farpaitement propres. Et drôlement jolis.

    Pour le reste, "Alexandrie, Alexandra"...

    Pardon.

    Otto Naumme

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  7. Merci, cher Tenancier, pour cette note très intéressante, d'autant que j'ignorais tout de ce que vous dites.
    Bon, c'est vrai, je lorgne plus souvent du côté du XVIIIe que du XIXe (siècle, pas arrondissement - quoique).

    Cette question, tout de même, que je soumets à votre sagacité comme à celle de vos lecteurs : pourquoi les guides sont si souvent de couleur rouge ?

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  8. Phil, la police utilisée semble avoir été crée pour les besoins du titrage. Je vous avoue mon ignorance quant à son nom ou si elle a été utilisée autrement que pour être apposées sur les premiers plats de couverture et éventuellement les pages de titre (sur le coup, et éloigné comme je le suis, je ne peux pas vérifier). Pour ce qui est de ces "nervures" on appelle cela des fers. Ce sont des pièces qui sont appliquées avec une forte pression sur la percaline ou le cuir. On reviendra sur le sujet un jour, en évoquant de loin et avec modestie le thème des reliures.
    Autant que je me souvienne, Christophe, même les guides anciens n'étaient pas tous rouges. Les Joanne étaient en percaline bleue, si je me souviens bien. Néanmoins, la tendance était tout de même à cette couleur. Selon moi, la raison serait que l'ouvrage serait repérable parmi les bagages et les quelques livres que l'on devait emporter durant les longues traversées. Le coté "marketing" ne devait guère compter dans ces choix, le commerce de la librairie étant très différent de ce qu'il est actuellement. En tout cas, avec ces guides, nous avons un type de reliure industrielle dans une matière qui pouvait supporter de nombreuses manipulations. En effet la percaline était souvent utilisée pour les guides, les romans populaires, etc. On excusera l'approximation de mes réponses, je suis à plusieurs centaine de kilomètres de ma base...

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  9. Vous êtes donc en vacances, Tenancier ? sans votre Baedeker, what a shame !
    Merci pour toutes ces précisions. Les fers, bien sûr... il faut savoir les mettre. Oui, Joanne est bleu. Baedecker vient d'Allemagne où la couleur rouge est souvent choisie (les voitures !). Y voir probablement une compensation climatique. Les guides Baedeker ont été souvent imité, les concurrents ont bien sûr produit leurs guides en rouge pour favoriser la confusion. Et pour finir, disons que la version actuelle du Baedeker est épouvantable et ne séduira jamais les collectionneurs.

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  10. Un peu de critique dans ce concert de louanges. D'abord pour ne pas faire comme la masse - un conformisme comme un autre, à la manière Stirner - ensuite parce que je suis grassement payé par la concurrence pour donner des coups de pieds dans votre fourmillière de béni-oui-oui. Je suis un homme du printemps, des feuilles vert tendre, du renouveau ; les feuilles d'automne qui se ramassent à la pelle c'est pas mon truc, tu vois, je préfère les oublier, n'en déplaise à l'ami Jacques et à son pote le kosmaque pas cosmique.
    Mais au fait venons-en au fait. Dès les quatre premiers mots, je suis arrêté et mon cœur se soulève devant tant de xénophobie perfide et sournoise. Que lit-on dans ces quatre premiers mots :
    "Bædeker (Charles et fritz)". Je passe sur le nom de famille, l'un des rares mots avec Ægypan qui nous donne la joie d'utiliser l'e dans l'a, j'enjambe le "et" qui fratermise avec la sympathique esperluète pour m'arrêter devant "Charles" et "fritz". Car c'est là que les sournoiseries commencent. On tente de faire dans le subliminal mais on chausse des gros sabots. Oui, il a le droit à sa capitale, le Charles qui nous fait penser aux deux grands dont nous sommes si fiers sans y être pour rien : le Magne et le Gaulle. L'empereur de l'Europe unifiée et le "Paris outragé ! Paris brisé ! Paris martyrisé ! mais Paris libéré !" Mais le fritz, le fridolin, il n'y a pas droit. Minuscule, le boche, le Prussien qu'on hait depuis 1870, qu'on étripe à la baïonnette en 1914 et qu'on est bien peu nombreux à combattre en 1940. On ne se débarrasse pas facilement de ses habitudes. On peut penser que l'Histoire infléchit mais ouiche ! On a beau se souvenir qu'en 1968 tout un chacun était juif allemand, rien n'y fait. Y'a de la rouille dans la sauerkraut et ça fait une drôle de bouillabaisse. Rien à faire. Le Français vôômit l'Allemand même quand il se force de ne pas. Même si c'est pas au niveau du conscient (Teufel ! un concept austro-hongrois ! donc presque fridolin...) J'arrête là, on a tous compris. Ce site est infréquentable.
    ... Et de quoi il parle, le bouquin en photo, de la Grande Bretagne. Notre ennemi héréditaire. Qu'on a combattu pendant cent ans. Qui nous a brûlé Jeanne d'Arc. Qui nous pique nos meilleurs bordeaux. Qui éclipse dans le monde notre Corneille et notre Racine avec son, ptui !, Shakespeare. Et j'en passe.
    Rideau. Je suis écœuré.

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  11. Ah la la, s'il faut faire des fautes pour avoir un discours pareil, je sens que je vais en faire tous les jours.
    Allez, je corrige, mon bon cls. Du reste, avez vous des lueurs (autres que les vespérales révolutionnaires) pour nous indiquer quel typo est utilisée dans ce guide prestigieux, mmmmhhh ?

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  12. ... et, Phil, je ne crois pas qu'il existe un Bædeker du Pays Natal : trop d'approximations.

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  13. Cls, que j'ai tendance à estimer, j'espère que votre tirade est humoristique.
    Si elle l'est, c'est malheureusement peu réussi.
    Si elle ne l'est pas, c'est un peu trop raté...
    Je suis déçu.

    Otto Naumme

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  14. Et dire que je voyais dans ce "Charles et fritz", une absence de cap assimilable à la licence, comme la création d'une entité gémellaire entre deux frères, par un Tenancier qui n'en eût fait qu'une bouchée sous la forme d'un seul nom propre débutant par une cap initiale.
    Zut !

    ArD

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  15. Ah bon, Otto ? Moi cela m'a amusé...

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  16. Ravi, ô Naumme, que vous soyez déçu : j'ai horreur des consensus. Pardonnez-moi (ou non) cette satisfaction égoïste.

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  17. Faut comprendre aussi. Notre cls s'est dernièrement fait la tête de Nietzsche. J'ai des documents photographiques qui appuient mes assertions. Je veux bien les fournir en échange de deux timbres au tarif courant ou bien, dans la série "Les Grandes Figures des lettres du XVIIe siècle" en Figurines Pannini, la carte qui concerne Vaugelas. Ça manque à ma collec'.

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  18. CLS, pour définir l'esprit "Baedeker", il faudrait savoir où est né "Karl" (et non Charles !...comme Danzig).
    Ainsi, rien de moins prussien qu'un Rhénan des années 1820, et plus austriaphobe et francophage.
    Tenancier, exceptée l'Afrique, je ne vois pas de pays que le Baedeker n'a prospecté. Pour apprendre des choses sur votre région natale, choisissez une édition d'avant votre naissance. (mais..êtes-vous né en afrique ? c'est bien possible !)

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  19. J'enregistre votre suggestion, Phil. Il y a toujours un charme inédit - parce que renouvelé - à lire des choses un peu anciennes sur l'endroit où l'on se trouve. Mais il n'y a pas de guide pour le Pays Natal, celui-ci étant par trop fantasmatique. De toute façon, comme le disait Voltaire "La patrie est où l'on se trouve bien" (citation approximative...), formule qui vous va comme un gant, Phil.
    Notre ami cls est embarqué depuis longtemps dans le XIXe siècle. A ce stade, son commentaire ne surprend plus pour qui est averti et prend même un certain sel pour son nième degré. On va lui laisser son fauteuil et son accès au bar...

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  20. "Plutôt que de visiter Londres, rester chez soi, au coin de sa cheminée, et lire les irremplaçables renseignements que fournit le Baedeker (Edition de 1907):[...]"
    Georges Perec, Espèces d'espaces, Galilée, 1974, p. 89.

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