Le mauvais œil

Je vous vois venir d’où je suis : comment se fait-il qu’après le succès de la première notice imaginaire, concoctée par ArD et Mouton à Lunettes, l’on ne voit rien de neuf poindre dans nos ci-devant colonnes, mmhhhhh ? Mais c’est que la chose est difficile à réaliser, ce me semble et les candidats font preuve d’une prudence qui n’est guère explicable que par une supposée sévérité de ma part, alors que, loin d’être un grognon (un bœufier, selon Boutmy), je suis prompt à me réjouir de l’esprit de mes contemporains, surtout lorsqu’ils sont assidus à ce blog. Et puis, je suis bien aise de vous dire que j’ai reçu une autre notice, déjà, et qu’elle ne tardera pas à paraître. En attendant, voici l’amorce d’une autre rubrique, fort simple et quelque peu connexe au petit jeu que je vous ai proposé (pour ceux qui ne savent pas, allez voir).

Ici, l'on reproduit dans sa splendeur originelle une notice, histoire de nous faire saliver et sans doute d’en inspirer quelques uns. Ajoutons que nous nous contrefoutons allègrement de l’insigne bibliophilie des objets, nous concentrant plutôt sur la curiosité et l’humour indéniable de certaines notices.
Bref, vous verrez bien, après tout.
Commençons par une notice tirée d’un catalogue de Pierre Saunier en date de 1996…


Ajoutons que les catalogues de ce libraire sont truffés de véritables morceaux de bravoure érudite et d’excentricités. Le Tenancier en possède quelques uns et regrette amèrement de ne point les avoir tous !

12 commentaires:

  1. La notice est effectivement plaisante, l'humour très fin.
    Une question : le "tranches jaspée" doit-il être pris comme une faute d'accord ? Si non, qu'est-ce que la jaspée, cher Tenancier ?

    Quant à la notice que nous devons vous remettre, il va falloir que je m'en occupe, c'est vrai que cette chère ArD a placé la barre tellement haut que je fais quelques complexes...

    Otto Naumme

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  2. Allons, allons, Otto, ce n'est pas un demi-veau qui va vous effrayer, n'est-ce pas ? Les barrières complexuelles sont des obstacles qui garantissent un maximum de satisfaction une fois qu'on les a chevauchées.

    Je suis sensible à l'hommage que vous rendez à ma notice à quatre mains, mais sachez que dégainer le premier dans un jeu d'une telle sévérité, eh bien... tout le mérite est là, bien plus que dans la notice elle-même.

    Pour vous aider, je vous donne un tuyau : ayez à l'esprit qu'une notice a pour objectif de faire vendre le livre, rien d'autre ! Votre humour légendaire devrait faire le reste. En plus des quelques bonnes heures de boulot que ça nécessite. On en ressort faussaire amélioré.

    ArD

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  3. Merci pour vos encouragements, vos ficelles et vos compliments, très chère ArD, je ne pensais pas en mériter tant !
    Et en tout cas moins que vous pour avoir ouvert la voie, et de quelle façon !
    Pour le reste, j'ai l'idée de l'ouvrage "noticié", il ne me reste plus, si j'ose dire, qu'à faire tout le travail nécessaire à la création d'une notice crédible. Une broutille, en quelque sorte...

    Quant à ce cher Tenancier, il semblerait qu'il n'ait toujours pas réussi à trouver le chemin de la sortie depuis sa dernière randonnée, à en croire son peu d'empressement à répondre aux questions à lui posées.

    Otto Naumme

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  4. Cher Otto, je n’avais pas renoncé à vous apporter des précisions sur les tranches jaspées, seulement j’ai eu affaire à quelques facéties pour l’accès à mon blog. Si vous lisez ces lignes, c’est que j’ai réussi…
    Effectivement, il y a une faute d’accord, ce me semble.
    La « jaspée » n’existe pas. En revanche, vous connaissez la jaspe, minéral qui présente des stries bigarrées assez caractéristiques. Et c’est cette apparence que l’on a réussi à reproduire sur les tranches des ouvrages. Le procédé est le même qui sert à faire le papier marbré qui sert au décor des plats des demi-reliures ou des gardes d’un ouvrages. Ici, il s’agit de préparer un bains de peintures avec un répulsif sur lequel on applique une feuille de papier, la peinture se déposant par contact. Naturellement, on peut appliquer différent dosages dans le bain, appliquer des motifs à l’aide de bâtons ou de peignes pour obtenir l’effet désiré. Pour ce qui vous préoccupe, il suffit de plonger légèrement la tranche dans le bain après en avoir « peigné » la surface. L’opération est délicate et est forcément artisanale, bien que désormais on peut s’amuser à obtenir la même chose - mais en moins gracieux - avec un procédé industriel. La tranche jaspée se rencontre généralement sur des ouvrages soigneusement reliés. (à suivre)

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  5. (Suite)
    Le livre ancien avait plus volontiers une tranche de couleur unie, de préférence rouge. N’oublions pas la popularisation de la tranche dorée au XIXe siècle, également. Outre la fonction décorative, peindre ces tranches permettait de « lisser » le papier et de le protéger de la poussière et donc d’empêcher de le teinter désagréablement. Généralement, c’est la tranche du haut (la « tête ») qui est dorée, colorée, parfois les trois tranches. Pour l’aspect jaspé c’est souvent les trois tranches.
    Enfin, lorsque l’on parle de tranches dorées, on fait souvent l’erreur de penser qu’il s’agit de ce que l’on désigne pour le dos de l’ouvrage. Les néophytes auront donc profit a parcourir ce blog qui renseigne sur la chose.
    Pardon pour cette explication très lacunaire, mais c’était pour vous en donner une idée, cher Otto.

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  6. le jaspe et non la jaspe, bien sûr...

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  7. Très cher Tenancier, vos explications sont aussi claires qu'une eau bellifontaine (m'en allant promener...) et aussi belles qu'une tranche jaspée.
    Soyez-en ici remercié.
    Et, en y repensant, j'imagine sans mal qu'arriver à "jasper" ou "dorer" une tranche de cette manière sans complètement imbiber les feuilles du livre ne doit pas être une mince affaire ; une réelle question de doigté (tout ceci dit sans la moindre fine plaisanterie, je précise, au cas où...). Il n'y aurait pas eu d'étape "intermédiaire", par exemple, plonger une feuille dans le bain puis appliquer cette feuille sur la tranche d'un ouvrage ?
    Merci encore pour vos doctes éclaircissements, de réelles enluminures !

    Otto Naumme

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  8. Comme des images valent mieux qu'une explication, parfois, voici ci-dessous un petit film explicatif. Un peu longuet, mais la musique qui l'accompagne vous fera patienter...
    http://www.dailymotion.com/video/xgygsb_fabrication-de-papier-marbre_creation
    Si je trouve quelque chose sur les tranches, je ferai de même.

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  9. http://www.moulinduverger.com/reliure-manuelle/roret-68.php
    La description ci-dessus rentre en contradiction avec la mienne. Il faudra, je pense, accorder plus de foi à celle-ci, la mienne étant tout théorique pour ce qui concerne les tranches. Cela dit, il y ambiguïté sur le terme "jaspé" car la description sur cette page fait plutôt référence à une aspect granité...

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  10. Ah, le manuel Roret est à l'honneur (encore !).
    Je ne vois pas réellement une contradiction, mais une ambiguïté. À mon avis, l'aspect granité qu'ils évoquent est lié à l'évolution de la technique de la jaspure et donc au mode de projection avec grillage préféré par les relieurs.

    ArD

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  11. Vous êtes dans le vrai, ArD, mais je fais gaffe car je m'aventure un peu, dans toutes ces descriptions. J'aurais bien aimé un praticien pour nous décrire la chose. cela en ferait un beau billet, dites-donc...

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  12. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

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