Le boulot, c'est l'boulot ! (Deuxième partie)

Le catalogage d’un livre peut sembler aisé et la très grande majorité d’entre nous se sortirait avec bonheur d’un tel travail, à condition d’en respecter quelques règles et quelques contraintes. Voici quelques opérations élémentaires auxquelles le professionnel se livre pour rendre son livre identifiable sur le net :
Nous allons partir du principe que nous n’utilisons pas de logiciel spécialisé mais d’un système simple qui nous permettra, de plus, de contempler le travail accompli. Un tableur de type Excel, qu’il provienne de Microsoft ou d’Open Office, fera l’affaire.
On le sait, ces logiciels permettent de créer des listes par colonne et peuvent être réutilisés pour les bases de données utilisées par les grands sites de vente. Le travail auquel on va se livrer ici va être la transposition du fichage de la fiche bristol vers la fiche électronique. Chaque colonne utilisée concernera un aspect particulier du livre, chaque ligne ne concernera qu’un livre. Il faudra donc au départ déterminer ce qui sera mis dans chaque colonne. Nous le verrons ci-après, avec la description du fichage.
Si nous avons défini l’outil, qui est fort simple, le reste va se définir par une série de manipulations précises mais dont la succession dépendra de la nature du livre. Ainsi, une série en plusieurs volumes ne s’appréhende pas de la même manière qu’un ouvrage broché ou relié. Leur approche peut subir quelques variations.
Mais, toujours, le premier contact avec un livre à décrire se fait par la manipulation de celui-ci. Il s’agit dès le premier contact de rassembler un certain nombre d’informations. Elles sont grosso modo de deux ordres :
- L’aspect physique du livre. Inutile de perdre son temps avec un ouvrage dont le nombre de tares dépasse l’intérêt d’une vente par correspondance. En effet, le libraire – il est parfois utile de le rappeler – est un marchand et s’il perd son temps a décrire un ouvrage défectueux (ce qui est plus long que pour un ouvrage en bon état dont on a subséquemment rien à dire), il ne s’occupe pas d’un livre de meilleur rapport. Par ailleurs, ce premier contact va servir au libraire à définir un certain nombre de défauts et de caractéristiques qui vont lui servir quand il va entreprendre de le décrire. Ainsi est-il préférable de noter immédiatement si l’ouvrage a des pages cornées, des soulignures, des manques aux pages, feuillets ou couvertures. La somme de ces détails accompagnera sa décision de répertorier ce livre dans ses listes ou non. Lorsque ces défauts dépasse le potentiel du livre (chose en partie subjective) alors il convient de renoncer. C’est ici la grande différence avec le libraire de neuf, par exemple qui n’a presque jamais à se soucier d’examiner un livre de cette sorte.
- L’intérêt éditorial du livre. Il n’y a aucun intérêt à ficher les livres suivants :
Quand la Chine s’éveillera de Peyrefitte
Que serais-je sans toi ?, de Musso
Si c’était vrai ?, de Lévy
Les Nothomb.
Aucun de ces livres ne rencontreront un acheteur potentiel. Les bouquinistes débordent de cette indigeste prose et les libraires les foutent à la poubelle. Il en va de même pour les Harry Potter. Toute cette littérature a saturé le marché et les bibliothèques particulières. Chaque fois que votre serviteur a fait l’acquisition d’une bibliothèque, il a dû virer tout ce fatras et bien plus. En réalité, ce que conserve un libraire se résume à ce qui constitue une littérature pérenne. Cela ne correspond pas forcément à la qualité supposée des livres, dans un sens ou un autre, d’ailleurs. Il va de soi que l’intérêt du professionnel se reporte vers des écrivains dont la réputation n’est plus à faire ou qui donne toutes les garanties de qualité ou de talent. Mais il peut faire le choix de défendre également quelques auteurs ou quelques courants littéraires, ce qui rehausse considérablement la qualité et le plaisir de son travail. Il peut encore faire appel à son flair et faire le pari sur les fortunes futures d’un écrivain.

(à suivre)

14 commentaires:

  1. Les Potter se trouvent partout à 50cts en petit Folio. Je me marre en pensant qu’à leur sortie, il fallait les payer fort cher et dormir sur le trottoir de la Flaque si on en voulait un « comme tout le monde ». J’ai essayé d’en lire un. Oui, bon…

    Pour Nothomb : même pas essayé. Et pas qu’à cause de ses horribles chapeaux.

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  2. Il est vrai qu'il est assez effrayant, quelques mois après, de voir le résultat de ces campagnes marketing qui desservent le livre à la longue...

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  3. Hé bien, quitte à en étonner plus d'un, j'avoue sans ambages que j'ai lu toute la série des Harry Potter avec le plus grand plaisir. Nullement à cause du marketingue, mais parce que j'étais tombé par hasard sur Bernard Giraudeau qui, à la veille de la sortie du deuxième ou du troisième tome, passa une Nuit de France Culture à lire le premier. Je n'avais jamais entendu parler du petit sorcier et j'avais raté le début de l'émission, alors je ne savais même rien du texte que j'entendais, mais j'ai été aussitôt happé.
    C'est de l'excellente littérature populaire, comme on en avait pas vu depuis longtemps.

    Cela dit, je suis entièrement d'accord avec le Tenancier : nul besoin pour un libraire de s'en encombrer : tout le monde les a, il n'y a plus d'acheteurs.

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  4. Pour être honnête, c'est de la bouche même de George que je reprends cette idée que tout le monde possède ces volumes, ce que je confirme encore. Pour le contenu lui-même, je ferai comme les sioux et aurai un devoir de réserve.

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  5. Cher Tenancier, je m'inscris en faux contre votre assertion. Quoi que l'on puisse penser des Harry Potter (dont, comme ce cher George, j'ai lu quelques épisodes avec plaisir même si je me suis lassé avant les derniers opus de la série), ils auront eu un grand mérite : amener à la lecture un grand nombre de jeunes qui ne s'intéressaient pas à cela auparavant.
    Certes, me rétorquerez-vous, mais ils en sont resté à ça ou à d'autres trucs débiles. Moui. Il se peut même qu'une bonne partie de cette population soit celle qui lise la "sainte quadrinité Levy-Musso-Nothomb-Houellebecq". Peut-être.
    Mais il se peut aussi que cela ait amené ces mêmes têtes blondes à s'intéresser d'un peu plus près à la littérature et à des ouvrages d'une teneur supérieure.
    Du reste, cher Tenancier, vos filles n'ont-elles pas lu ce bon Harry ? Et cela les empêche-t-il de lire d'autres choses plus "sérieuses" ? Vous connaissez ma progéniture, elle a lu HP, en anglais pour certains opus, même. Ca ne l'empêche pas d'avoir des lectures d'une autre portée par ailleurs.
    Il ne faut pas non plus être monolithique à ce sujet - et, quoi que cela puisse me coûter de le dire, cela vaut également pour les lecteurs de la "quadralité" plus haut citée.
    Gardons-nous de tout excès de jugement en la matière...

    Otto Naumme

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  6. Faudrait se relire, élève Otto, éviter de passer de la "quadrinité" à la "quadralité"...
    Ou attaquer par "L'art du néologisme". Ca s'impose.

    Otto Naumme

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  7. Otto, vous m'avez mal lu, semble-t-il ou, cas plus probable, je me suis mal exprimé.
    Voici ce que je dis plus haut : "Cela ne correspond pas forcément à la qualité supposée des livres, dans un sens ou un autre, d’ailleurs". Le sens de ce billet est la rentabilité d'un travail, celui du catalogage. Il se trouve qu'il y a pléthore d'Harry Potter dans tous les coins et que nous, librairies d'occasions ne savons plus qu'en faire ! Pour autant, et à nos yeux, l'abondance n'est pas forcément synonyme de médiocrité. Il y a également des merdouilles à tirages confidentiel ! Si je réserve mon opinion sur cette série d'ouvrages quant au contenu, c'est que je ne l'apprécie pas trop pour mon compte mais que j'envisage tout à fait qu'on puisse prendre un plaisir de qualité à la lire. Quant à l'argument selon lequel cela pousse les mômes à la lecture, j'ai souvent joué au docteur dans ma vie et cela ne m'a pas donné de diplôme de toubib, de même que jouer à la guerre ne m'a pas transformé en G.I. Joe. Croyez accessoirement que je le regrette. Cet argument est quelque peu spécieux et donne bonne conscience aux promoteurs de ce genre de littérature. Otto, vous pouvez faire mieux.

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  8. Cher Tenancier, c'est moi qui ait un peu tout mélangé, je le crains, vous avez raison dans votre réponse, je m'ai trompé...
    Bien sûr que HP n'a aucun intérêt pour un libraire d'occasion, même si vous faites bien de le rappeler.
    Quant à l'aspect promotion de la littérature, outre le fait qu'en matière d'argument spécieux, les vôtres se posent un peu là, je me suis surtout basé sur des observations. Comme vous avez sans doute pu le faire vous-même. Nos filles ont à peu près le même âge, ont du, elles et leurs copains/copines de classe lire HP. Et je pense qu'il en va de même pour votre fille aînée et ses copines que pour ma progéniture, ça a poussé certain(e)s à la lecture.
    Et, comme le souligne ce cher George, c'est de la littérature populaire. Il y a mieux, même dans ce domaine, bien sûr. Mais il y a aussi tellement pire.
    Bref, désolé de m'être mal exprimé dans mon précédent envoi, j'attendrai d'être mieux réveillé avant d'intervenir, une prochaine fois...

    Otto Naumme

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  9. Voici ce qui arrive lorsque nous n'avons pas notre quantité de café ! Je reconnais volontiers que mes arguments étaient de mauvaise foi. Mais cela m'a amusé. Il m'en faut peu.
    Effectivement, nos filles sont de cette génération-là. Mais je suis au regret - en observateur partial et attentif - de vous dire que le choc littéraire fut fait avec Les Liaisons dangereuses pour ma fille, et non HP qu'elle lut du reste sans déplaisir. Mais, la trace en est plus durable. Comme vous le soulignez assez bien, Harry Potter prépare bien à la lecture... de la littérature populaire. Puisque vous me connaissez un peu en dehors de ce blogue, vous savez bien que cette littérature a été loin de m'être étrangère et que mon propos n'a rien de péjoratif. Cependant, je constate que l'étiquette "jeunesse" accolée à une certaine littérature n'a pour effet que de retarder l'approche de la littérature - qu'on hésite à appeler "adulte", pour le coup. L'état d'adolescence est devenu une vaste foire où les intérêts se coagulent : ceux des éditeurs, des banquiers, des marchands de soupe transistorisée (audio et vidéo), etc. Or la liberté n'est point le confort d'un état mais l'insécurité devant nos manques et nos ignorances. Vous et moi aurions eu la sensation de déchoir à lire de ces choses dans notre jeunesse. Alors pourquoi avaliser cela pour nos enfants ?
    Enfin, tout cela est un autre débat qui sort du cadre de ce blogue. Nous versons dans la discussion littéraire. Je sens que l'engueulade va pointer son sale museau !

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  10. Je me contenterai de rétorquer à Otto que mon imprimante HP me donne toute satisfaction.

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  11. Tt, tt, cher Tenancier, relisez bien, je ne parlais pas de votre fille, que je sais aussi intéressée par la littérature que la mienne, mais de leurs copains/copines, pas toujours aussi gâtés, n'ayant souvent pas eu des parents (vous ou ma modeste personne) pour les influencer.
    Pour le reste, oui, il faut faire attention à la "soupe". Et HP n'amène pas automatiquement, loin s'en faut, à Julien Gracq. Mais si cela en amène ne serait-ce que quelques-uns, c'est déjà pas mal.
    Quant à ma propre enfance/adolescence, elle a été principalement bercée par les paradoxes, passer du Club des 5 à Camus (ou inversement) ne m'effrayant pas, à l'époque. Et, globalement, je suis à peu près revenu des uns comme des autres ;-)
    Pour finir, les discussions littéraires peuvent se révéler intéressantes, non ? Et, surtout, ne pas finir en engueulade ; je me vois mal me fâcher contre vous...

    Otto Naumme

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  12. George : c'est facile, trop facile !

    Otto Naumme

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  13. Hé oui, cher Otto : une des séquelles de la lecture des ouvrages de J.K. Rowling, sans doute…

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  14. Mon pauvre, Otto. Je ne sais pas lire, c'est bien connu.
    Blogue à part, je sais bien que nous sommes d'accord sur toutes ces choses et que nous nous désaccordons que sur des détails...

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