Une certaine forme d'épuisement

Vous vous en êtes rendu compte, ce blog n’est plus très productif depuis plusieurs mois, se contentant la plupart du temps de transmettre des historiettes, des images et des devinettes. Certes, tous ces petits billets sont fort plaisants et je ne me fais jamais faute de les relayer et d’y prendre moi-même plaisir. Reste que ce qui faisait à un moment le corps de ce blog s’est progressivement estompé, à savoir des textes portant sur le livre et ses environs. La cause réside certes dans un certain épuisement du sujet mais également en un autre type de fatigue. C’est que l’activité principale de votre serviteur est en train de plonger progressivement vers le néant. Cette déshérence de ma librairie ne peut aller sans une perte subséquente de moral et d’allant qui se répercute même dans le plus petit geste quotidien, se rapportant au travail ou bien aux envies. C’est ainsi que de lentes dérives en petits abandons, on se retrouve avec un chiffre d’affaire au dixième de ce qu’il fut, une envie douceâtre de tout laisser tomber non par une rupture brutale mais par une longue absence au terme duquel on se laisserait accroire que tout se serait, tout à coup, évaporé. De même, les différentes activités auxquelles je m’étais voué se sont retrouvées également vidées de leur sens, par un phénomène de « dégât collatéral ». On pourrait penser à un état dépressif. Peut-être. Peut-être est-ce seulement la fatigue de quelqu’un qui se bat depuis des années et qui ne voit pas venir grand-chose pour ce qui fut, tout de même, un projet très prenant. Que je réponde par avance : non, ce n’était pas le projet d’une vie. Je n’ai jamais eu l’ambition d’avoir ma propre librairie. Les raisons qui m’ont amené là sont complexes et vastes. Je fais l’impasse sur une explication ici, parce que c’est plutôt barbant. De toute façon, les choses sont claires, je suis parti sur une mauvaise pente avec tout cela et je m’épuise à courir après les déceptions.
Bon, que faire ?
D’abord, prendre quelques décisions : à cinquante-trois ans, ce n’est même pas la peine d’essayer de faire autre chose que ce que l’on sait faire depuis longtemps (depuis 1979, exactement…) donc, essayer de relancer cette librairie en refondant ma manière de travailler. Ne pas insister si, malgré tout, cela ne marche pas plus. Cela signifiera que ce n’est pas dû à ma seule impéritie. Enfin, pas trop.
Ensuite, se dire qu’à s’enfermer dans une chose, on finit par ne plus voir le monde. Il est temps donc que je sorte de cette librairie. Cela ne va faire progresser mon chiffre d’affaire, mais je vais sans doute moins me fatiguer et plus rigoler avec les potes. De toute façon, même en ne sortant pas, je n’en faisais pas plus. Alors…
Et puis, s’échapper de cette volonté de vous parler exclusivement du livre sur le plan matériel au travers de ce blog. J’avoue que j’ai eu envie dernièrement de le clore. Sans doute vaut-il mieux le faire progresser un peu, ce qui sera moins violent pour mes lecteurs.
Bref, plutôt que d’adopter un mode de révolution violente pour tout ce qui me concerne — et vous également lorsque vous me lisez — je ferai preuve d’un peu plus de nuances dans le changement.
Cela changera-t-il réellement les choses ? Ce n’est pas certain. Disons, que j’aménage mon inconfort, que je tente de rendre acceptable un certain nombre de déceptions.
Et puis, on ne vit pas que parce que l’on fait, fort heureusement.
Vous devez cette temporisation à ArD qui, par bien des manières, a suggéré que la partie valait peut être encore la peine d’être jouée, ne serait-ce que par les rencontres qu’elle procure et les bonheurs qui en découlent.
Pardon pour cette digression, mais je vous devais au moins quelques explications.

5 commentaires:

  1. Merci cher Yves de cette confession.
    Ne désespérez pas, je vous en prie, tenir, il faut trouver le - les - moyens de tenir.

    Amicalement

    Judith Abitbol

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  2. Yves,
    qu'importe les ans...(aucun défaut de prononciation ici !) Seule compte la passion,
    Bruno dirait sans doute qu'il faut choisir un autre angle.
    De l'avant toujours de l'avant ! (gna gna gna!)
    Biz

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  3. Je vois bien ce que vous avez l'impression dévorante de rater, cher Yves. Et si on se mettait en devoir de lister tout ce que nous avons raté dans ce monde de chiens, le désespoir clôturerait la liste, c'est sûr.
    Mais je vais vous dire - puisque vous me le permettez avant même que je n'en ai demandé la permission - ce que vous réussisez avec ce billet. Vous distillez ce qui est absent des trois quarts des blogs et de la moitié du reste : de l'écriture qui dit ce qu'est vraiment celui qui écrit. En vrai. Où il en est. Comme dans une conversation entre vieux camarades.
    ET ça, pour peu gratifiant que cela puisse vous sembler être, c'est quelque chose.
    Merci pour ces lignes authentiques. Je ne vous donnerai aucun conseil - j'en suis bien incapable en ayant moi-même besoin de beaucoup sans en chercher nulle part - parce que la fatique, la lassitude, la déception, l'insipidité passagère, sont des choses que l'on dépasse soi-même, presque par nécessité de vivre.
    Bien à Vous, en tout cas.

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  4. Cher Tenancier, je ne puis que joindre mes encouragements à ceux que vous prodiguent Judith, Adria et Bertrand, même si je me sens moi-même coincé de tous côtés.

    Et heureusement que ce blogue regorge de propos qui dépassent largement le seul aspect matériel du livre, sans quoi il aurait depuis longtemps été déserté par les facétieux que nous sommes — vous le premier…

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  5. Voir le Tenancier dans cet état me donne envie d'faire sauter l'Assemblée nationale! Ça, ça r'mettrais son homme!

    V.

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Ah oui, au fait... Le Tenancier ne répondra plus aux commentaires anonymes. Prenez au moins un pseudo.

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