De la Correctionnelle au Paradis


Le métier de libraire tel qu’on l’exerce et tel qu’on aime le concevoir s’apparente un peu à celui d’enquêteur. Ainsi, à partir de données fortuites l’on peut reconstituer un fait qui pourrait très bien passer inaperçu. Ce fut le cas lorsque nous découvrîmes cette absence de rabat à l’un des ouvrages de la Bibliothèque Internationale d’Érotologie. Cela nous entraîna à découvrir que cette absence n’est en aucun cas fortuite mais due très vraisemblablement à la sollicitude de la Chambre Correctionnelle de la Seine vers 1963. Un autre aspect qui ne nous avait pas sauté aux yeux de prime abord me fit du reste proférer une sottise. Dans le deuxième billet consacré à cette histoire, je notais que :
« Certains éditeurs – et précisément pour cette collection – se gardaient bien de mettre une illustration de couverture, histoire de ne pas exciter encore plus Anastasie, espérant sans doute ainsi d’échapper à ses coups de ciseaux. »
L’erreur est d’autant plus flagrante que cette collection n’est pas rarissime et qu’on la croise très fréquemment.
Or, presque simultanément, et en réaction à notre petite enquête, Adrià, fidèle lectrice et correspondante de notre blog publiait de son côté un complément à nos billets avec quelques couvertures de la collection. Force nous était de constater que, contrairement à ce que j’avais déclaré, certains volumes comportaient bien une jaquette illustrée, au moins jusqu’à fin 1962. Il fallait alors conclure que la disparition de la liste des ouvrages sur les rabats était concomitante de ce caviardage… Mais cette affirmation peut tout aussi bien être hasardeuse, d'autant que d'autres éléments venaient semer le trouble...
Dans les documents reproduits par Adrià, le rabat du n° 9 comportait également des lacunes pour les titres des numéros 5,6 & 7 de la collection.
Ensuite, son blog reproduisait également un bandeau qui constituait une sorte de « sceau de garanti », pièce assez rare, du reste. La notification de l’interdiction à l’affichage et à la vente aux mineurs y était explicitée…
Ce qui ressort de tout cela est que chaque publication fut l’objet d’un contrôle de la censure et que le simple constat que nous avions eu à propos de cette absence de rabat aurait dû nous entraîner à une exploration complète de tous les titres parus et de dresser un inventaire des changements opérés sur ceux-ci : disparitions des illustrations de couvertures, mastics, massicotages, bandeaux, papillons, etc. Hélas, pour le moment, nous ne connaissons aucune personne possédant une collection complète. Nous ne désespérons pas d’en trouver une pour trouver d’autres traces et d’autres matières à supputations.
En attendant, on peut se poser la question de l’acharnement de Pauvert à publier une telle collection. L’imagerie d’Épinal voudrait sans doute que celui-ci ait publié ces ouvrages par pur militantisme. On pensera surtout au fait que les trois tomes de l’Érotisme au Cinéma avaient atteint un tirage de cent vingt cinq mille exemplaires vers 1964. On se dit que le confort d’un tel tirage ne pouvait que donner envie de faire durer la chose.
On incite le lecteur à vivement se reporter au billet d’Adrià ici.
Pour les autres billets concernant cette histoire c'est ici et .

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