Je me souviens d'un livre

Nos lecteurs le savent bien, nous aimons les livres qui ne sont pas sages. On s'en convaincra en allant voir , par exemple.
Julien Mannoni, autre confrère, également. Il nous communique une courte méditation autour de l'un de ses trouvailles. On ira d'ailleurs voir avec beaucoup de profit les catalogues qu'il met en ligne de temps à autre...

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Je me souviens d'un livre, un livre déjà vieux, comme moi, un livre du XXe siècle. Il était amusant... C'est qu'on savait s'amuser en ce temps-là ! Et beau aussi ! On venait, je crois, d'inventer la photocopieuse, et tout le monde s'amusait à se prendre la tronche en photocopie... Alors, sur ce livre, sur le dernier plat, comme disent les anciens libraires comme moi, on avait mis la photocopie de la tête de l'auteur. Mais rien n'était très clair... C'est un peu confus.... Ca devient un peu flou, toutes ces histoires, pour moi... C'étaient les années 1960, à Amsterdam, c'est si loin... Il était beau ce livre, ça c'est sûr... très beau !... Mais de quoi parlait-il, déjà ? Et puis, l'auteur... Décidément, je n'en ai plus souvenir.


Julien Mannoni

25 commentaires:

  1. Ah oui... attendez, ça me revient... c'était un in-16, une plaquette agrafée de huit feuillets, avec une couverture verte... C'est Thomas Rap, je crois, qui l'avait publié, quelque part à Amsterdam donc, vers 1969. Il y avait une bande-annonce aussi, qui éclairait le tout. Une bande annonce lumineuse ! Oui, ça, on était lumineux en ce temps-là... mais... pour le reste... c'est toujours obscur !

    Julien

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  2. Ah mais... Julien, c'est que nous aurons été feuilleté votre dernier catalogue avec plaisir des yeux et aurons découvert ce complément d'information ; après les Mémoires d'un con, c'eût pu être Les Mémoires d'un amnésique!

    ArD

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  3. Ah, cher ArD, que j'aimerais que chacun lise mes catalogues avec tant de soin que vous... Personne ne m'a pour l'instant posé la moindre question sur ce numéro 75 sans auteur ni titre :p

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  4. À vrai dire, il ne m'est pas venu à l'idée qu'un catalogue de libraire puisse contenir une devinette : je me suis donc contentée d'imaginer qu'il s'agissait d'un anonyme, quoique cette hypothèse soit imparfaite à cause du... prix du livre.

    ArD

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  5. Mais serait-ce une première. On a fait beaucoup de choses, avec les catalogues !

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  6. Oui, cher Tenancier, je suis parfois fort présomptueux !

    On dit, par exemple, que Berès, cachait dans chacun de ses catalogues un livre outrageusement sous-estimé. Le jeu était d'être le premier à le repérer et à l'acheter.

    Et puis ce numéro 75 est plus un coup de flemme qu'un coup d'éclat : ayant déjà rédigé ce billet pour le blog, j'ai jugé inutile de faire une fiche pour le livre...

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  7. Le blog et le Tenancier s'en sentent extrêmement honorés !

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  8. Mmmh, je demeure sceptique sur une telle estimation pour un livre dont l'auteur est obscurci, donc indirectement étonnée par le prix de la devinette.

    ArD

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  9. Bah, 90 euros, c'est le prix exact du marché. Je me souviens avoir conseillé à un confrère de proposer à 300 euros un livre entièrement emballé dans du gros ruban adhésif pour couturier. Vendu en une semaine. Si on y réfléchit, ces prix sont dérisoires pour de l'art contemporain, car, oui, c'est plus une oeuvre d'art contemporain que de la haute bibliophilie.

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  10. Ah... eh bien voilà, l'explication est claire; il suffisait donc de se dégager de l'entonnoir bibliophile.
    Si je comprends bien, vous assimilez cela à une œuvre d'art contemporain anonyme (en quelque sorte ?

    ArD

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  11. Ah non, ce n'est pas anonyme, puisque la bande-annonce, quand elle est conservée, indique bien que Topor est à l'origine du gag. J'assimile ça à la fois 1) à un livre, puisqu'il apporte une information, toute entière ramassée dans le titre ("Souvenirs"), la teneur de ces "Souvenirs" s'éclairant particulièrement vivement dans le corps de l'ouvrage, 2) à une oeuvre d'art, puisqu'on déplace la fonction d'un objet pour en faire autre chose, 3) à un objet de bibliophilie, parce qu'il réunit les deux qualités ci-dessus énoncées, qu'il n'est pas commun, et qu'il est ici en première édition (il fut réédité 10 ans plus tard).

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  12. Bon alors, finalement, vous assaisonnez la sauce en créant le doute, mais au fond, il n'y a pas de devinette ? Si l'on comprend assez vite qu'il s'agit d'un gag de Topor, on se demande pourquoi le libraire n'a pas complété le champ n° 75 du nom de l'auteur : un sur-gag de libraire?(!)

    Permettez-moi de légèrement modifier la pertinence de votre démonstration en 3 points. À mon sens, le point 2 ne déplace pas la fonction d'un objet, car nous continuons d'avoir affaire à un livre, il entrave, dérive ou biaise une action, celle de la lecture. Mais cette chinoiserie ne change rien à la résolution de l'énigme bien sûr.

    ArD

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  13. Un livre qui n'en a que la forme, et auquel seul un élément étranger, comme qui dirait un produit dérivé (la bande-annonce) donne sens... Mais, c'est vrai, nous autres libraires d'ancien ou de rare, sommes maîtres dans l'accomodage de sauce ;-)

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  14. Il y a aussi des libraires qui s'amusent à présenter dans leurs catalogues des ouvrages n'ayant d'existence que purement fictive.
    J'ai sous les yeux un catalogue de février 2000 proposant un soi-disant Payot de 1933, Examen de la philosophie de Robert Fludd, d'un certain Marcel Yarmolinsky et un "peu courant" Jean-Baptiste Botul de 1892, Paroles silencieuses et dits muets

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  15. Mais ce dernier titre existe, c'est BHL qui l'a acheté, quant au premier je l'ai vu dans la bibliothèque de mon ami Borgès. Quel est le confrère facétieux ?

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  16. C'est la librairie Entropie, Bd Voltaire à Paris. Mais je ne crois pas qu'ils aient publié d'autre catalogue depuis.

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  17. Oui, la librairie Entropie est un endroit intéressant. J'y suis passé une fois en compagnie de CLS.

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  18. Sauf que le tenancier du lieu lève un peu trop le coude, alors il vaut mieux éviter d'y passer à l'heure de l'apéro. Ou le contraire, car c'est un partageux.

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  19. Je vais songer à y revenir... on pourrait s'y donner rendez-vous, George, puisque vous avez l'air de connaître les lieux.

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  20. Qu'insinuez-vous ? Je pense, qu'avec de si bons livres, ils ont juste tout vendu et fêtent ça depuis lors !

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  21. Je renonce à penser un seul instant qu'il puisse y avoir de tels pochetrons dans la corporation. Au fait, nous avons appris, Julien, que votre dernier catalogue fut un succès... compliments !

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  22. Mais non, mais non, pas un seul d'entre nous n'a jamais bu. D'ailleurs, j'amènerai les glaçons !

    (Quant au succès, il reste relatif, et je n'oublie pas qu'en bon commerçant je dois me plaindre, car, comprenez-vous la conjoncture, l'euro et la Grèce qui ne philosophe plus assez...)

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  23. Ah... c'est donc ça «avoir des problèmes de Grec» ?

    ArD

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  24. Pas du tout : Godard est nul en version et en thème, voilà tout. Mais mieux vaut avoir des problèmes de Grec que des problèmes en Suisse, vous dirait Polanski…

    Tenancier, point besoin de rendez-vous : ce pochetron-là (bien que ce soit d'ordinaire les imprimeurs ou les relieurs, qui les livres rognent, plus que les libraires) est un intime et je suis presque toujours dans les parages. Passez-y quand vous voulez, il vous fera bon accueil

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Ah oui, au fait... Le Tenancier ne répondra plus aux commentaires anonymes. Prenez au moins un pseudo.

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